Le délicieux Rondo en ut majeur Op. 51 n°1 a été écrit en 1796 et publié à Vienne l’année suivante. Ce célèbre Rondo se construit autour d’un refrain Moderato e grazioso plein de délicatesse dont le thème chantant exposé sur de simples batteries de main gauche, encadre deux couplets dont l’un traité dans le mode mineur s’enrichit d’une harmonie subtile. L’œuvre est à peu près contemporaine des premières grandes sonates pour piano auxquelles Beethoven s’était attaqué dès 1794 : y passent quelques échos de la Sonate en ut majeur Op. 2 n°3 qu’il venait de faire publier.
Plus tardif que le précédent, le Rondo en sol majeur Op. 51 n°2 a été achevé en 1801 et gravé chez Artaria à Vienne en 1802. Beethoven le dédia à la comtesse Henriette von Lichnowski, même si à l’origine il semble que la dédicace ait été adressée à l’une de ses jeunes élèves, Giulietta Giucciardi, dont il était très épris. Dans ses souvenirs, celle-ci relate que Beethoven lui réclama la partition après lui en avoir fait don « lorsqu’il voulut dédier quelque chose à la princesse Lichnowski ». En échange, Giulietta Giucciardi reçut en hommage la Sonate en ut dièse mineur dite «Clair de lune». Le thème Andante cantabile e grazioso du refrain de l’Op. 51 n°2 a quelque chose de mélancolique et intensément poétique sur ses grands traits de triples croches, ses silences, ses contretemps. Il contraste avec l’épisode central Allegretto en mi majeur sur un rythme à 6/8 allant vers plus de légèreté.
Dédié à l’archiduc Rodolphe d’Autriche, élève et ami de Beethoven, le rondo Alla ingharese quasi un capriccio en sol majeur Op. 129 « Die Wuth über den verlorenen Groschen » (Colère à cause d’un sous perdu) date des années 1795. Sans doute fut-il achevé par Anton Diabelli qui en réalisa l’édition à Vienne en 1828, un an après la mort de Beethoven, comme opera postuma. Beethoven lui avait simplement donné le titre de «Leichte Kaprize».
L’Andante en fa majeur WoO 57, Andante grazioso con moto, composé en 1803 ou 1804, fut probablement d’abord conçu par Beethoven comme mouvement lent de sa vingt-et-unième sonate, la Sonate en ut majeur Op. 53 «Waldstein» du nom de son dédicataire, le comte Waldstein, premier protecteur du compositeur à Bonn et excellent musicien. Beethoven y renonça finalement pour des raisons d’équilibre et remplaça ce mouvement par une brève Introduzione s’enchaînant dans la sonate avec le rondo final.
En 1791, alors qu’il mettait la dernière main à son Rondo en si bémol majeur Anh. 6, Beethoven était à la veille de quitter Bonn, sa ville natale, pour s’installer définitivement à Vienne. Ce morceau que certains ont attribué à Léopold Kozeluch ou même à Mozart, est une vaste pièce pleine de gaieté et de virtuosité, dont le thème rebondit sur d’heureux petits mordants.
Beethoven laisse trois séries de vingt-quatre Bagatelles pour piano. Bagatelle : Les sept premières Bagatelles Op. 33 ont été composées en 1802, peut-être un peu antérieurement pour certaines. Ce sont des pièces lyriques secrètes et merveilleuses, écrites comme pour soi. La première Andante grazioso, quasi allegretto en mi bémol majeur, d’une simplicité toute intérieure et chantante, traitée comme un rondo, repose sur un thème charmant, qui s’anime bientôt autour de gammes rapides et de triolets de doubles croches. Suit un espiègle Scherzo allegro en ut majeur encadrant une partie centrale plus grave et un trio. Le troisième numéro, un Allegretto en fa majeur, a tout l’entrain que lui confère son rythme à 6/8, relevé par une riche harmonie. L’Andante en la majeur qui lui succède repose sur un thème d’une grande délicatesse, tandis que la cinquième bagatelle, Allegro ma non troppo en ut majeur, offre tous les aspects d’une fantaisie teintée d’allégresse sur une parfaite virtuosité, traversée par d’amusants triolets de doubles croches, avec une partie centrale plus rhapsodique. Très dépouillé, l’avant-dernier morceau, Allegretto quasi andante en ré majeur, intensément poétique requiert comme l’indique Beethoven une expression soutenue « con una certa espressione parlante ». C’est sur un Presto en la bémol majeur véhément et presque violent que se referme ce recueil plein d’imprévus et de surprises qui toujours étonnent et ne lassent jamais.