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A propos du titre « Pour Bunita Marcus »

Morton Feldman a, dès les prémices de sa carrière, glissé des dédicaces dans les titres de ses compositions. L’une des toutes premières fut « Pour Cynthia », un court morceau de piano dédié à sa deuxième femme. Puis vint « Pour Franz Kline » dédié au peintre expressionniste.

Feldman était fier de ses relations avec les artistes rencontrés dans les années 1950 grâce à John Cage. « Les caractères d’artistes tels que Rothko, Pollock, [de] Kooning, et Kline sont très proches du mien », déclara Feldman. « Leurs recherches me sont très intimes ». En donnant leurs noms à ses compositions, Feldman a renforcé le lien qu’il entretenait avec une liste d’artistes prestigieux du New York d’après-guerre. Les noms que Feldman a utilisés incluent Frank O’Hara (le poète), Mark Rothko, Willem de Kooning, Philip Guston (peintres), Aaron Copland, John Cage, Christian Wolff, Stefan Wolpe (compositeurs), et Samuel Beckett (l’écrivain, poète, et dramaturge). Un nom se démarque cependant des autres : Bunita Marcus.

Bunita Marcus a étudié de 1975 à 1981 à l’université de Buffalo où elle obtint son Doctorat en Composition, avec Feldman comme professeur. En 1983, Feldman déclara : « Je suis admiratif de cette fille. Je crois qu’il y a de quoi être enthousiaste à son égard. Aussi longtemps que je vivrai, je n’aurai jamais une autre étudiante comme elle. Jamais ». Bien que Feldman ait pu émettre de violentes critiques à l’égard des autres compositeurs, il n’avait que des louanges à faire sur Marcus et son « penchant naturel pour exceller dans ce qu’elle fait. » Ses compositions desquelles il disait avoir beaucoup appris étaient « splendides » et « élégantes ».

Marcus était également une proche de Feldman, entretenant depuis leur rencontre une relation intime mais irrégulière avec ce dernier. Elle refusa sa demande en mariage en 1981, mais ils restèrent liés jusqu’à la mort de Feldman en 1987. Marcus n’était en aucune façon son unique muse ; au contraire, Feldman était un coureur de jupons invétéré. Mais Marcus, à laquelle l’œuvre de ce CD est dédiée, et qui fut la commanditaire du dernier morceau de Feldman pour piano, “Palais de Mari” (1986), restera à jamais étroitement liée à sa légende.